croquis de nez
Italie, Cagliari - Caroline
Ça sent le bitume cuit au soleil, quand on s'arrête les odeurs se précisent ou se localisent plus facilement : l'odeur âpre de l'urine d'un chien qui sèche sur le bord d'un trottoir tout près sur la gauche, la boulangerie un peu plus loin à droite qui crache ses odeurs chaudes, sucrées et rondes de viennoiseries et de fruits confits par la bouche d'aération au ras du sol et derrière moi un grand pin répand un léger parfum de sève.
© Caroline Bouissou
Sur ces points qui fixent le paysage s'agitent les traversantes, des mouvements colorés qui s'imposent par leur force et des fois leur persistance dans un paysage déjà chargé : un parfum qui passe, des odeurs de pot d'échappement... la chaleur exacerbe chacune des odeurs.
Arrivée à Versailles - Laurence
© Laurence Fanuel
L’air est chaud, l’air est humide, l’air est floral, à fond, ça rentre par tous les pores. Ça rappelle le miel, un miel sauvage de montagne. Ça rappelle la fleur de châtaignier. Qu’est-ce donc? Ce sont les tilleuls en fleurs Boulevard de la Reine. Je suis surprise car cette année, la note verte caractéristique n’est pas là, ou du moins est-elle enterrée sous des monceaux de methyl anthranilate, cette molécule typique des fleurs jaunes.
Les fleurs sont un peu sur le tard, sans doute en est-ce la raison? Les fleurs cette année abondent, je sens une sorte de paradis perdu refaire surface au milieu du chaos, la nature s’exprime volontairement, amicalement, ici en tout cas, en soutien à nos affres subies. Nous faisons un, par l’odeur et notre respiration aussi, le lien est là, plus évident que jamais. En chemin pour mes cours à l’ISIPCA, je redécouvre à chaque voyage un Versailles entre histoire et nature, un paysage olfactif qui lui est bien propre.
Italie, Cagliari - Caroline
© Caroline Bouissou
Il y a une odeur d'herbe fraîche celle que l'on a piétinée pour arriver sur le banc et en fond une odeur plus sèche parfumée comme de la santoline, mais que je n'arrive pas à en identifier
la source. Je suis assise sur le banc dans le creux derrière un petit relief herbeux. Le vent vient d'en face il est un peu iodé. J'essaie de resserrer le cadre de mon paysage olfactif pour mieux le définir.
Sant Feliu de Guixols, Hotel Eden Roc, Espagne - Laurence
Une vapeur de café flotte dans l’air, un air assez propre au passage, je veux dire sans graillon ce qui, au petit déjeuner, serait un peu lourd à digérer, nasalement.
C’est un joli hôtel de bord de mer, construit sur son roc. Une grande salle aérée, l’air sent au final bien davantage l’air du dehors, mis a part cette tache de café dans l’oxygène marin.
dans l'avion - Caroline
© Caroline Bouissou
Deux odeurs de sueur, la mienne et celle de mon voisin un peu forte. La voisine de droite prend un chewing-gum à la menthe et fait des bulles, amenant des bouffées d'odeur fraîche. De quelques sièges devant une odeur pestilentielle vient envahir plusieurs passagers qui le manifestent dans un râle. L'air est activé sur plusieurs rangées et on ne sent plus ni la sueur, ni la menthe pendant un moment, l'odeur désagréable a tout recouvert. Est ce que c'est parce qu'elle est désagréable ou parce que sa nature couvre les autres ?
Pays basque - Victoria-Anne
Je pense tout de suite à la campagne basque, où je suis née et j'ai grandi. Plus particulièrement, le paysage de la salle polyvalente où j'ai passé une bonne partie de mon enfance. Une odeur de fond verte et tiède venant des étendues d'herbe luxuriante du dehors, qui tisse la toile sur laquelle viennent se dessiner des odeurs chaudes et caprines de crottes de brebis et de gaz d'échappement de la route juste à côté. Puis une note camphrée de gaulthérie pour le spray froid des entorses et une odeur soufrée et humide des chasubles usagés sont comme des touches de couleurs vives rajoutées au pinceau. Je croise souvent ces différents souvenirs olfactifs lorsqu'un parfum ou une matière première me transporte en un claquement de narine dans ce paysage de ma mémoire.